L'histoire de Cassiopée.

Un bruit de cavalcade. Un galop souple, rythmé, solitaire qui résonne dans la plaine comme un roulement de tambours. Une tâche blanche qui balaie la prairie comme si rien ne pouvait l’arrêter. Le bruit qui s’accentue encore, encore et encore. Les sabots noirs qui martèlent le sol.

La jument grise se tournait, de temps à autre, regardant en arrière, afin d’être sûre qu’elle n’était pas suivie, ou du moins que ses assaillants étaient encore loin. Pour la énième fois, elle tourna la tête. D’un galop souple et puissant, elle franchit les derniers mètres de la plaine qui la laissait à découvert. Immédiatement elle s’enfonça dans les bois.
Un bruit de galop parvint depuis l’autre bout de la plaine. Sans attendre, quatre magnifiques chevaux s’engagèrent à la suite de la jument. L’étalon de tête portait avec magnificence une robe fauve, sans aucune trace blanche. Il était visiblement le plus rapide. De près, il était suivit par trois autres chevaux. Celui qui se tenait juste derrière lui était noir comme l’encre, tandis que ceux sur les côtés, étaient bais.
La voix rauque de l’étalon alezan fendit l’air, tel un fouet :

« Rattrapez-là, elle ne doit pas s’échapper. »

Ils augmentèrent leur vitesse.
Bientôt, en un temps beaucoup plus court que celui qu’avait mis la jument, ils pénétrèrent dans les profondeurs des bois.

La jument blanche ne s’était pas arrêtée. Elle galopait toujours, son souffle se faisant de plus en plus court. Malgré tous ses efforts pour atteindre son but, elle se sentait rattrapée. Diamant, car c’était ainsi qu’on l’avait nommée petite, continuait sa course effrénée, sans jamais vouloir s’arrêter. Elle sentait ses forces la quitter petit à petit. Bientôt elle ne pourrait plus faire un pas. Elle puisa au fond de ses réserves, avec une seule phrase en tête : « Pour la Liberté. »
Mais, cela ne suffit pas. Alors qu’elle entrait dans le lit d’une rivière, les quatre étalons parvinrent juste derrière elle. Elle nagea aussi vite qu’elle le pouvait, ignorant les cris de Kosaoé, l’étalon alezan et chef du troupeau. Diamant parvint de l’autre côté alors qu’ils étaient à peu près au milieu de la rivière. Elle ressortit aussi vite que possible et reprit sa course à travers les bois.

Alors, elle commit l’irréparable. Elle se retourna. Etrangement elle ne vit pas ses poursuivants. En moins d’une seconde, elle se retrouva projetée à terre, d’une façon violente. Diamant se retrouva étourdie et vaincue. Au-dessus d’elle, une imposante silhouette se dressait, celle de Kosaoé. Diamant baissa la tête. La voix dure de l’étalon s’éleva dans les airs.

« Relevez-la. »

Elle se retrouva debout sans même comprendre ce qui lui arrivait. Alors, ces mots s’échappèrent des lèvres de la belle jument :

« Un jour, viendra le temps de la vengeance, et ce jour j’espère pouvoir y assister. »

Personne ne l’entendit, car personne ne lui prêtait vraiment attention. Diamant possédait un don, ma foi bien particulier : elle était en mesure de faire des prophéties. Et, ce jour-là, de son ventre, naquit un lion, un lion qui sommeillait au plus profond d’elle-même. Un puissant instinct, mené par la vengeance en personne.
La jument s’en retourna auprès du troupeau de Kosaoé, là où son père l’y avait envoyé.
Elle ne tarda pas à attendre un poulain de l’étalon alezan, dès ses premières chaleurs pour être exact.

Savez-vous pourquoi je vous raconte cette histoire ? Parce que c’est celle de ma mère. Diamant est ma mère, Kosaoé mon père. Quant à moi, je m’appelle Cassiopée, et aujourd’hui, je vais vous raconter mon histoire, la vraie. Pas celle que je donne à ceux qui me demande d’où je viens, la seule et unique qui fait de moi ce que je suis à présent. Mon enfance, mon passage à l’âge adulte, le poulain que j’ai perdu, mon premier meurtre. Cette histoire n’est pas amusante, non, loin de là. Pourtant, c’est ainsi qu’elle s’est déroulée.
Alors, êtes-vous prêts à entrer dans ce tourbillon d’aventure ? Je suis persuadée que oui. Plongez, et écoutez, car, c’est ainsi que mon histoire commença…

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